Carnet de voyage de Sébastien Joanniez publié par Citrouille

Les articles de Citrouille dans le rétro — Décembre 2003 à février 2004 : Sébastien Joanniez (son blog ici) est parti pour trois mois en Amérique du sud. Histoire de prendre l’air et de mieux revenir ensuite à son écriture. Nous lui avons proposé de tenir un Carnet de voyage, dont il nous a envoyé chaque page par mail.

•message du 4 déc. 03 – Je m’appelle Sébastien Joanniez, j’ai 29 ans et parfois, il me vient dans l’imagination des choses qui font des phrases qui font des livres. C’est ainsi que mon métier d’aujourd’hui, c’est écrivain.

Mais il y a aussi des moments où je n’arrive plus à imaginer, où ma tête est vide de rêves à écrire et je n’ai qu’une envie : voyager. Me perdre dans les rues d’un autre monde, me refaire une santé en prenant l’air ailleurs.

Alors, bientôt, je vais partir. En Amérique du Sud. J’atterris à Lima au Pérou le 9 décembre et je redécolle de Buenos Aires en Argentine au mois de mars 2004.

Entre ces deux dates, il va m’arriver quelque chose. Je ne sais pas quoi, je n’ai pas d’idée sur ce qui m’attend là-bas, je ne sais même pas ce que j’attends, moi, de ce voyage. Il s’agit de se laisser aller à vivre : je vais mettre un pied devant l’autre sans savoir comment ni pourquoi, ni même où je me dirige. L’aventure, ça me va comme objectif.

Pendant mon voyage, j’écrirai peut-être, j’écrirai sûrement puisque c’est ma respiration d’écrire.

Alors j’enverrai des choses de là-bas, pour donner de mes nouvelles et de celles du monde, pour raconter quelques instants et les partager comme ça.

En attendant le départ, je suis heureux et j’ai peur…

•message du 28 déc. 03 – Je suis arrivé à Lima (9 au 10 décembre), parti à Tarma (11 au 14), puis Huancayo (le 15), Huncaveliva (du 16 au 21), Ayacucho (du 22 au 28). Et aujourd hui je suis à Ica

L’ARRIVÉE
Quand j’arrive à l’aéroport de Lima (Pérou), je n’ai pas dormi depuis deux jours comme j’ai fait la fête avec mes amis, et puis le voyage dure plus de douze heures : il faut aller en Espagne, traverser l’Océan Atlantique, puis le continent sud américain, pour enfin atterrir à Lima.
Alors c’est avec les yeux des dernières forces que j’entre en Amérique.
Une foule de gens attend derrière une barrière, certains avec des pancartes aux effigies des grands hôtels de luxe, d’autres cherchent un visage familier parmi les arrivants.
Moi je suis avec Laurent, un ami, et nous décidons de nous asseoir pour boire un coup.
Nous sommes épuises, à six heures de décalage avec notre temps de France, lessivés.
Je pense que chez nous, il est minuit passé et je bois ma première Cristal, la bière de Lima.
Elle a un drôle de goût. Il faut dire qu’au début, tout a un drôle de goût, une odeur étrange, une apparence bizarre.
Rien ne ressemble.
Le voyage commence là où l’on est surpris.
Et cette bière, elle signe mon entrée au Pérou. Dans l’étranger.

EN MOINS
Il y a mes disques et mes livres, ma ville et mon quartier, la boulangerie en dessous de chez moi et ses meilleurs croissants du monde, mon amour Aurélie, mes amis, ma famille qui fête Noël sans moi, l’eau chaude de la douche et les pots d’échappement sans pollution, les deux fleuves de Lyon qui se rencontrent et partent ensemble vers la mer, le café, le fromage, les yaourts, les journaux qui se lisent au coin d’un comptoir, l’odeur de ma couverture quand je m’enveloppe dedans, la langue française qui chante autrement que l’espagnol, l’hiver et le givre, la manière des Français de râler contre tout et pour rien, faire la cuisine, faire l amour, faire comme chez moi, ce que j’aime déjà.

EN PLUS
Il y a les étonnements de chaque jour, l’Océan Pacifique et la Cordillère des Andes, la lumière sur les sommets qui entourent la ville d‘Ayacucho, le visage des gens d’ici, les taxis qui sont des mobylettes arrangées, ne pas savoir au matin de quoi sera faite la suite, la vie sans ce que j’aime déjà et la recherche d’être bien tout de même, l’espagnol qui chante autrement que le français, prendre le bus à l’aube et traverser le pays au soleil levant, la nuit de l’hémisphère sud et son ciel à l’envers du nord, écrire sur internet à l’autre bout du monde, les chiens errants qui détalent au moindre klaxon, le cuy, le pollo a la brasa, la cusqueña, la chicha, le chocolate, la manière des Péruviens de râler pour rien et contre tout, être ailleurs, être le même ailleurs, être autrement le même qu’ailleurs, ce que je vais découvrir, ce que je vais aimer.

•message du 9 janv. 04 – Arica – Chili

LA VIE D’EVA
La douleur d’Eva vient de Carlos.
Parce qu’ils sont jeunes et beaux et qu’ils ont de l’argent par dessus le portefeuille, ils ont tout le temps de s’embrouiller la vie avec les amours et les intrigues sans fin.
Alors Carlos rêve de conquérir Jessica tout en jurant à Eva qu’il l’aime. Et Eva l’a compris, elle pleure tant qu’elle peut en maudissant Carlos, seule dans l’appartement qu’ils partagent en haut d un immeuble de Buenos Aires ou de Lima ou de Santiago, ou peut-être est-ce Madrid, ou Paris, ou New York. On ne peut pas savoir: la vie d’Eva se raconte en espagnol mais elle se passe n’importe où. L’essentiel est de comprendre sa douleur et l’envie de vengeance qui lui déchire le coeur et qui lui fait dire au téléphone à sa copine Cindy qu’elle va voir ce qu’elle va voir et que l’amour est un plat qui se mange toute seule dans l’horrible monde que l’on vit aujourd hui.
Eva fronce les sourcils et la musique devient effrayante.
Puis on voit Carlos: il boit une bière avec son ami Juanito en peignoir et il lui explique son désir pour Jessica tandis que Juanito raconte sa nuit avec une fille dont il a oublié le nom mais qui n’est pas sa fiancée Katy la belle que l’on voit se morfondre elle aussi parce qu’elle a bien senti que Juanito n’est plus le même depuis quelque temps.
Vraiment la vie des filles est difficile, on se dit, dans l’univers d’Eva.
Et heureusement, on les voit toutes discuter entre elles et préparer des stratégies pour faire souffrir un peu les garçons aussi.
Elles pleurent mais elles ont dans les yeux les projets qui blessent.
Ça va saigner sec, et on attend vite le déroulement des choses pour apercevoir une souffrance qui nous libérerait le suspense, et on reprend un coca ou une bebida quelconque pour rester encore un peu devant l’écran d’Eva qui maintenant peut danser tranquille dans son salon et oublier le cauchemar de sa liaison avec Carlos.
On boit du bout des lèvres, la tête levée vers le fond du restaurant et l’esprit braqué sur Daniel, qu’on avait oublié celui-là, mais qui lui aussi n’en peut plus de douleur à cause de son patron Ramirez le gros bourgeois qui veut le virer parce que la femme de Daniel, Daniela, n’a pas voulu passer la nuit avec lui dans l’autre épisode.
Ramirez veut se venger comme ça par le licenciement, surtout qu’avec sa femme ce n’est plus le bonheur depuis qu’elle s’est amourachée d’un petit jeune qui n’est autre que Juanito lui même.
Tout s’explique et on est tellement heureux de tout comprendre qu’on achète des cacahuètes à un gamin qui passe entre les tables pendant qu’une publicité nous vante l’émission de ce soir sur RED, la chaîne qui nous promet de chasser l’ennui dès qu’on l’allume.
Les cacahuètes c’est pratique, on peut les manger sans rater une action de la vie d Eva.
On garde la bouche ouverte et simplement on jette les cacahuètes dedans.
Puis Carlos revient en pleurs, Juanito se demande si Katy a découvert son secret, Eva danse encore, Daniel et Daniela essayent de planifier quelque chose pour se débarrasser de Ramirez, Juanito serre la ceinture de son peignoir en roulant des yeux inquiets à sa fenêtre, Jessica téléphone à sa mère, la femme de Ramirez change de robe.
Tout le monde se débrouille dans ce monde cruel comme il peut.
Et ce qu’ il y a de bien ici, au Chili comme au Pérou, c’est que la vie d’Eva a envahi tous les restaurants, les bars, les rues, les maisons, que toutes les tables et les chaises et les attentions sont tournées vers l’écran où Eva et ses amies et les amies des amies d’Eva vivent et se reproduisent et meurent et ressuscitent.
Alors on peut suivre sans problème toutes les aventures, de n’importe quel endroit où l’on se trouve, on n’en perd pas une miette.
Du coup, on oublie que le temps passe, qu’un voisin nous est arrivé puisque rien ne nous oblige à lui parler car lui aussi la vie d Eva le ravit.
On est tranquille.
On reprend un coca.
On se sent si bien dans la peau de quelqu’un d’autre.
Au milieu des couleurs saturées, dans le vacarme des vidéos, on existe à peine.


•message du 12 janv. 04
– San Pedro de Atacama, en plein désert le plus aride du monde…

ATACAMA
Il y a une famille près de moi
et les hommes boivent de la bière
et les enfants comptent les cailloux
et les femmes discutent de la pluie
moi
au milieu
seul
je ne fais rien
que les voir
et me taire
je n’ai pas de famille
pas de pierres
pas de bière
je me trouve
et je vois le mond
qui me trouve
seul
sans rien à faire
sans rien a compter
rien à boire
rien à rassembler
rien
et moi au milieu

•message du 15 janv. 04 – C’est beau, marcher dans le désert ça me rend la force au coeur et ça me fait trouver l’essentiel, des réponses cachées sous les pierres. Aujourd’ hui je me retrouve de nouveau à Calama pour rejoindre l’océan pacifique et me désaltérer un peu. Au Chili je suis allé à Arica du 30/12 au 06/01, puis Calama du 07/01 au 09/01, puis San Pedro de Atacama du 10/01 à aujourd’ hui. Bises de la ville retrouvée, de la technologie et de la fascination automobile – en mi corazon hay siempre el viento.

SAN PEDRO
il y a des gens dehors
ils éclatent de rire
la nuit est tombée depuis longtemps
le ciel est à ne pas rater
les étoiles
la voie lactée
tout est là
offert
je suis couché dans le sable
et je regarde

parfois je ne regarde plus
je me perds dans mes idées
où dans les étoiles
je ne sais pas
je ne pense à rien parfois
qu’à être la
vivant

puis je me souviens
il y a le ciel ici
les gens là-bas
et moi quelque part
alors
je reprends le cours du temps
le fil
jusqu’à m’absenter encore
et encore

les rires se sauvent en silence
le ciel s’efface
le sable
le vent
je suis bien
à être
simplement

•message du 20 janv. 04 – Los Hornos, un village de pêcheurs. C’est un coin sans touristes où les gens partent à l’aube et reviennent au soir si l’océan veut bien les rendre à la terre. Ils ont les yeux de ceux qui ont vu les monstres marins, les mains tranchées par les filets, la voix rare et le mot juste. Ils ne savent souvent ni lire ni écrire. Moi je me suis tu et pendant quatre jours j’ai marché et j’ai écoute et j’ai vu. Carlos m’a dit que je serais le bienvenu si je revenais, et il m’a serre la main très fort. C’était comme une amitié.

LOS HORNOS
je vis dans une tente
plantée dans une grange
j’ai deux toits
et moi dessous
j’écris

il y a de la musique en sourdine
une espèce de guinguette
sud américaine

j’écris

l’océan m’a renversé
les vagues du pacifique brisent l’échine
elles jettent des carcasses de crabes
des coquillages en morceaux
des cailloux fracasses
la plage est un cimetière
où tout s entasse

et j’ai lutté pour vivre
résister
aux assauts des écumes
je me suis tenu debout
je n’ai pas eu peur
et tout s’est bien passé

c’est maintenant
qu’il fait nuit
que la musique chantonne
que l’océan couvre tout
c est maintenant
que je tombe
de sommeil

finalement
je ne suis pas fort très longtemps
et l’océan gagne à tous les coups

•message du 23 janv. 04 Serena, au Chili… Toujours en poésie parce que… je ne sais pas pourquoi… peut être une manière du temps qui s’estompe et se dilate, et il n’y a que l’espace entre les mots pour donner ça, le temps…

LA SERENA
il y a des courants d’air qui ne trompent pas
et les réponses prennent leur temps

de l’endroit où je suis assis
il n’y a que le silence
et le vent qui passent

je suis à la déroute
je ne connais pas mon chemin
des croisements par tous les sens
et des allées qui s’en reviennent au même
ailleurs

alors je m’assois
et j’écoute le vent
et le silence passer

je ne sais pas quel pied poser
par quoi commencer la marche
comment savoir plus loin que soi
je me cherche à perte de vue
et je me trouve prêt de partir
où sur le point de rester
je ne sais pas

je suis assis
je pense à moi et à mon pays et à mon amour et à mes amis
je pense comme au retour d’une campagne de cent ans
avec la mémoire qui défaille
quant aux noms
quant aux visages
quant aux mots qui s’échangent dans mon pays
je pense dans une langue qui n’est pas la mienne
et je rêve à des lieux de chez moi
à des éternités d’ici
je suis comme en dehors
chaque fois sans racines
chaque jour sans attaches
et je veux revenir
puis je veux rester
je ne sais pas

le vent passe
le silence
et je ne sais toujours pas

je suis assis
et il y a des courants d’air qui ne trompent pas

•message du 27 janv. 04 – Je suis à Santiago pour quelques heures encore et je me surprends à ne pas être surpris par la ville, à croire que j ai vécu ici dans une autre vie… Je me promène et les rues défilent et je ne me perds pas, je connais mon chemin partout… troublant… et joyeux… ça me permet de voir le Santiago des petites ruelles et des recoins paumes… de rencontrer les gens loin du centre… Je pars en Argentine ce soir, à Mendoza, voir de l’autre côté de la Cordillère des andes, voir si le monde change par là -bas…

SANTIAGO
Plaza de Armas, Santiago, énième dimanche du temps ordinaire, neuf heures du matin, soleil, fontaine, bancs et chiens errants dispersés dans l’espace, amoureux, clochards, pas de vent, pas de froid, un prêcheur annonce la fin du monde dans un haut parleur, il veut sauver mon âme, la cathédrale en face est fermée, jeunes qui reviennent d’ivresse, sommeil, long voyage pour arriver ici à l’aube, pas la force de faire des phrases, des mots, juste des mots, des pigeons qui claquent des ailes, tout le monde se précipite sur le pain libre, et toujours cette voix qui hurle, Jésus est le chemin, Jésus t’aime, Jésus et tous les saints, alleluia, des enfants postés sur le bord de la fontaine, un homme se nettoie les chaussures dans l’eau, un autre me réclame de l’argent, et Jésus qui m’aime, Jésus le seigneur, une odeur d’égout, un bus qui passe et fait un vacarme, Jésus est la vérité, bribes de conversations derrière moi, sur mon banc personne, un éboueur pousse une poubelle, arbres gris, Jésus promet l’enfer aux menteurs, aux adultères, aux malditos de ce monde, dormir, me reposer, trouver une place pour me reposer, santo es el señor, rêver un peu aujourd hui, un autre bus, un autre vacarme, Jésus le christ, me bénit, me veut dans sa maison, santo es el señor, et moi qui cherche à m’étendre, passants jettent un oeil au prêcheur, les flics aussi, un oeil par-dessous, oiseaux chantent entre deux phrases du seigneur, buissons bruissent, le vent se lève, les bâtiments sont des ministères, éducation, finances, intérieur, Plaza de Armas, derrière La Moneda palais présidentiel, je pense a Allende, à l’idéal d Allende, à son meurtre, dormir, oublier le seigneur et dormir, assis dans l’ombre un homme écoute les prédications, chauve, bouche bée, mains croisées, du métro sortent des grappes de gens, de plus en plus, une jeune femme écoute un walkman, cheveux longs, yeux noirs, une autre se cure les ongles, cheveux longs, jambes blanches, un autre bus, vacarme, Jésus, Dieu, sauve ton âme, la clef, la clef, c’est la clef mon ami, la llave amigo, Jésus es el camino, une femme traverse la place, chemisier rose, démarche légère, le soleil est déjà chaud, dormir, gloire a Dieu, m’allonger sur ce banc et dormir, deux chiens noirs passent, caniches, une alarme s’entête, un homme en jean, un autre en sandales, le prêcheur a fini de prêcher, musique divine, silence presque, pas de bus, pas de vent, m’étendre ici et dormir, maintenant.

•message du 02 fév. 04

Envie d’écrire en direct
pas de brouillon
pas de pensée d’avant l’écrire
envie de livrer sur le vif
la ville de Cordoba
la deuxième d’Argentine
et la foule qui s’en va au travail
et les boutiques regorgent de produits dérives
et les places ont l’air de s’attendre à l’événement du siècle
la venue du pape
ou l’ovation d’un footballeur
la vieille ville
et ici rien n’est vraiment vieux
le nouveau monde c’est
alors
la vieille ville de Cordoba
c’est comme l’antiquité chez nous
la cathédrale est belle et la Vierge a une robe de soupirante
et le Christ dans ses bras c’est un baigneur
moi
je me perds dans les rues
je suis arrivé ce matin à l’aube
et je ne connais rien de l’orientation
le nord a ses limites
et le sud se planque à l’ouest
quant à l’est

donc mes pas s’en vont dans les brouillards
la carte je l’ai perdue aussi
par contre
j’ai trouvé un cinéma
ciné club même
et ils passent La Dolce vita ce soir
je vais aller le revoir
pour le plaisir
et en attendant
je continue la route de mes errances
la marche décidée à ne pas savoir
le coeur en avant vers la rencontre
et je me change l’âme de tous ces carrefours
c ‘est ce que j écris aujourd hui
03:57 à l’heure d’Argentine
quatre heures de plus dans mon pays
avenida Illa
dans un cyber à ventilateur inutile

•message du 07 fév. 04

Atlantique, 05.02.04

au-dessus de l’Atlantique
quelque part
je reviens
et derrière moi les souvenirs et les moteurs de l’avion
derrière moi le voyage
l’Amérique
et les mois de chemins à travers
les pas et les routes
alors
je me refais l’histoire
je me rappelle
puis devant moi les ailes et la France
la vie en jours d’hiver
et le printemps à venir
alors
je m’imagine la suite
je rêve
au-dessus de l’Atlantique

******

Madrid, 05.02.04

Madrid
et il faut encore partir
pour revenir vraiment
il faut se remettre à l’heure du vieux monde
oublier l’accent des Amériques
le flot de l’océan
le vacarme
les rencontres au coin de la rue
la vie au goût du jour
il faut oublier
puis se souvenir
ne rien perdre des leçons
ne rien laisser à l’abandon
du voyage
revenir nouveau
avec cette force des itinéraires
cette possibilité de voir le monde autrement
mes yeux voient
mes mains touchent
mon âme ressent
il faut rester comme en mouvement
s’installer dans l’exceptionnel
continuer à découvrir
chez soi les inconnus
en soi se connaître encore
mieux
vivant.


© Sébastien Joanniez + Citrouille