Coup de coeur éditeur des éditions Albin Michel jeunesse : Nos vacances – Interview de Blexbolex

  • Publication publiée :18 février 2018
  • Post category:Archives

Dans Nos vacances Blexbolex tisse par l’image un récit tragicomique sur l’aveuglement boudeur d’une petite fille contrainte de partager, durant son séjour chez son grand- père, ses jeux et ses repas avec un invité indésirable. L’ennui, la déception, la colère, le rêve et la joie traversent les personnages et rebondissent en écho dans la mémoire et le cœur du lecteur.

Vous avez confié la narration entièrement à l’image. Pourquoi ce choix ?

BLEXBOLEX: Dans Romance, Saisons et L’Imagier des gens, la question de la narration a toujours été implicite. Pour Nos vacances, j’ai cherché à établir une syntaxe narrative suffisamment forte pour que la lecture se fasse à l’intérieur des images mêmes. La double-page s’est donc rapidement imposée comme espace pour la narration. L’emploi de vignettes a permis d’apporter du rythme et de la nervosité à l’album là où des légendes et des onomatopées auraient cassé la continuité visuelle des pages. Au lecteur ensuite de se raconter l’histoire à lui-même. De mon côté, j’essaie de lui donner des outils de lecture, mais je ne cherche pas à délivrer un message. S’il en existe un, il est implicite à la succession des événements et des actions que le lecteur découvre à travers mes images.

Quelles ont été vos influences pour la conception de Nos vacances ?
BLEXBOLEX : Il y en a vraiment beaucoup, ou alors très peu, selon le point de vue. Pour l’aspect visuel, Richard McGuire, dans son ouvrage Ici, a magistralement réussi à fixer un espace narratif composé d’images et de vignettes. Son livre a été pour moi un magnifique support de réflexion, même si mon propos et mon intention sont totalement différents. Pour le rythme et la description des actions, j’interroge encore et toujours l’artiste Frans Masereel. Plus je le lis, plus je suis étonné par la finesse de son langage. L’œuvre de l’écrivain et poète japonais Kenji Miyazawa a également beaucoup compté. Il n’a pas son pareil pour nous faire retrouver nos sensations d’enfance.

C’est la première fois que vous parlez implicitement de l’enfance à travers un de vos livres.
BLEXBOLEX : Nos vacances est un drame minuscule auquel j’ai tenté de donner une dimension plus importante que les faits effectivement relatés, car c’est pour moi tout le sel et la valeur de l’enfance. Même si je me garde de porter un jugement moral sur les actions des uns et des autres, je ne veux pas que le lecteur s’en prive, au contraire. Ce sont sur les personnages, et tout particulièrement sur les deux enfants du récit, qu’il va fixer ses sympathies ou antipathies. Ainsi, les personnages obtiennent une certaine autonomie vis-à-vis du lecteur et c’est là tout l’enjeu de ce livre. Même si les dispositions et les choix de la fillette déterminent le récit, c’est bien le lecteur que je souhaite maintenir au centre de la narration. Il faut à la fois le guider et lui laisser la liberté de changer de point de vue chaque fois que ça lui semble utile ou agréable.


Propos recueillis par les éditions Albin Michel Jeunesse

Un autre album
de Blexbolex
chez Albin Michel Jeunesse :

Romance… Voilà un titre court qui en dit long. Mais c’est quoi au juste, une romance? Une romance, c’est un peu comme une chanson de geste, une chanson de baladins. À chaque interprétation, le récitant reprend le texte d’origine et y ajoute ce qui lui passe par la tête, étoffant ainsi l’histoire pour la confier à son suivant. Dans ce livre OVNI Blexbolex nous emmène au bout d’un long chemin évidemment semé de mots et d’images redondantes mais qui confèrent à ce livre un charme fou. D’une créativité extraordinaire, cet imagier totalement décalé se déroule comme une suite logique, presque arithmétique. On est littéralement précipité dans l’histoire qui se compose alors au gré des pages comme on improviserait un morceau de jazz… Tout commence par une simple promenade, sur le chemin de l’école. Progressivement, chaque image ajoutée, chaque protagoniste croisé au gré des pages, devient un élément de construction pour l’histoire qui s’avère de plus en plus palpitante et surtout, exponentielle. On finit alors par se demander où peut bien s’arrêter cette histoire, voire même si elle aura une fin. Et puis d’ailleurs, si on recommençait? – in Citrouille n°67