Avec Réclamez des contes, son nouvel album paru aux éditions Les fourmis rouges, Delphine Jacquot n’abandonne pas l’univers des contes pour lequel elle a une «affection toute particulière». Mais elle l’aborde cette fois sous un autre angle, avec «un ton décalé, parfois absurde». Et même avec auto-dérision… Une interview menée par Gwénaëlle Launay, librairie La Courte Échelle à Rennes.
GWÉNAËLLE LAUNAY: Comment s’est construit le projet de l’album Réclamez des contes? En collaboration avec l’éditrice, seule sur ta table à dessins?
DELPHINE JACQUOT: Passant beaucoup de temps à chiner, c’est à l’occasion d’une brocante, début 2014, que j’en ai eu l’idée. Une ancienne publicité pour du fil à coudre, mettant en scène Gulliver ligoté par les Lilliputiens à l’aide de ce fil, y était exposée. Ce détournement, à la fois amusant et intéressant, m’a aussitôt donné l’envie d’adapter ce concept à d’autres contes. Pendant près de trois mois, j’ai travaillé sur le texte et les images avant de présenter mon projet à Valérie Cussaguet, l’éditrice des Fourmis rouges avec qui j’avais réalisé mon premier album solo, Les aventures improbables de Peter et Herman. Et puis, c’est avec le soutien du CNL que j’ai pu me consacrer pleinement à cet album, aux recherches et à sa mise en couleurs.
DELPHINE JACQUOT: Passant beaucoup de temps à chiner, c’est à l’occasion d’une brocante, début 2014, que j’en ai eu l’idée. Une ancienne publicité pour du fil à coudre, mettant en scène Gulliver ligoté par les Lilliputiens à l’aide de ce fil, y était exposée. Ce détournement, à la fois amusant et intéressant, m’a aussitôt donné l’envie d’adapter ce concept à d’autres contes. Pendant près de trois mois, j’ai travaillé sur le texte et les images avant de présenter mon projet à Valérie Cussaguet, l’éditrice des Fourmis rouges avec qui j’avais réalisé mon premier album solo, Les aventures improbables de Peter et Herman. Et puis, c’est avec le soutien du CNL que j’ai pu me consacrer pleinement à cet album, aux recherches et à sa mise en couleurs.
As-tu commencé par le texte ou les illustrations?
Le texte et les illustrations ont été pensés simultanément. Pour le choix des histoires, celles-ci nécessitaient d’être connues de tous pour permettre une lecture immédiate des réclames. J’ai donc privilégié des récits qui nous sont familiers et puisé mon inspiration dans les publicités de la fin du XIXe siècle aux années 1950. Je tenais à ce que l’objet de la réclame renforce la symbolique du conte ou en perturbe le déroulement. Ainsi, avec ses rollers à moteur, la tortue parviendra toujours à devancer le lièvre tandis que Cendrillon, avec sa paire de grandes bottes à lacets, quittera le bal sans laisser la possibilité au prince de retrouver sa trace… Et oui, les contes se révèlent parfois cruels mais les versions que je propose peuvent l’être encore davantage! Dans un format à la française, l’album laisse place à des illustrations pleine page réalisées aux crayons de couleurs et à des réclames, dont le graphisme joue un rôle essentiel.
Le texte et les illustrations ont été pensés simultanément. Pour le choix des histoires, celles-ci nécessitaient d’être connues de tous pour permettre une lecture immédiate des réclames. J’ai donc privilégié des récits qui nous sont familiers et puisé mon inspiration dans les publicités de la fin du XIXe siècle aux années 1950. Je tenais à ce que l’objet de la réclame renforce la symbolique du conte ou en perturbe le déroulement. Ainsi, avec ses rollers à moteur, la tortue parviendra toujours à devancer le lièvre tandis que Cendrillon, avec sa paire de grandes bottes à lacets, quittera le bal sans laisser la possibilité au prince de retrouver sa trace… Et oui, les contes se révèlent parfois cruels mais les versions que je propose peuvent l’être encore davantage! Dans un format à la française, l’album laisse place à des illustrations pleine page réalisées aux crayons de couleurs et à des réclames, dont le graphisme joue un rôle essentiel.
Des contes… souvent des contes… Que représentent-ils pour toi?
Depuis mes débuts, il est vrai que les opportunités d’illustrer des contes n’ont pas manqué! Ils sont, pour moi, un véritable terrain de jeu pour développer un univers à la fois classique et singulier. Intemporels et empreints de merveilleux, ils permettent une grande liberté de représentation et d’interprétation. Leur dimension fantastique, où les animaux parlent, les tapis volent, les pantins s’animent, s’apparente au rêve et ouvre ainsi, pour l’image, le champ des possibles. Par ailleurs, mes illustrations jouent aussi beaucoup avec le symbole, l’onirisme ou l’étrangeté et peut-être est-ce là aussi l’esprit du conte ou le point de rencontre.
Depuis mes débuts, il est vrai que les opportunités d’illustrer des contes n’ont pas manqué! Ils sont, pour moi, un véritable terrain de jeu pour développer un univers à la fois classique et singulier. Intemporels et empreints de merveilleux, ils permettent une grande liberté de représentation et d’interprétation. Leur dimension fantastique, où les animaux parlent, les tapis volent, les pantins s’animent, s’apparente au rêve et ouvre ainsi, pour l’image, le champ des possibles. Par ailleurs, mes illustrations jouent aussi beaucoup avec le symbole, l’onirisme ou l’étrangeté et peut-être est-ce là aussi l’esprit du conte ou le point de rencontre.
Est-ce de «l’auto caricature» de la majorité de ton travail mené jusqu’ici, référencé comme celui d’une «illustratrice de contes», pour en casser cet aspect «classique»?
Tu l’as compris, j’ai une affection toute particulière pour les contes. Mais en effet il y a ici, dans cette démarche, une certaine forme d’autodérision! Cendrillon, la Belle au bois dormant, Aladin ou encore Riquet à la houppe sont autant de personnages classiques qui m’ont familiarisée, dans mon travail d’illustration, avec ces récits. Dans un ton décalé et parfois absurde, ma volonté était de les aborder, cette fois, sous un autre angle. Loin d’être la première à les revisiter, les contes ont cette capacité à se réinventer et c’est aussi avec cette envie de me renouveler que j’ai souhaité cette approche différente, gentiment subversive.
Tu l’as compris, j’ai une affection toute particulière pour les contes. Mais en effet il y a ici, dans cette démarche, une certaine forme d’autodérision! Cendrillon, la Belle au bois dormant, Aladin ou encore Riquet à la houppe sont autant de personnages classiques qui m’ont familiarisée, dans mon travail d’illustration, avec ces récits. Dans un ton décalé et parfois absurde, ma volonté était de les aborder, cette fois, sous un autre angle. Loin d’être la première à les revisiter, les contes ont cette capacité à se réinventer et c’est aussi avec cette envie de me renouveler que j’ai souhaité cette approche différente, gentiment subversive.
Propos recueillis par Gwénaëlle Launay, librairie La Courte Échelle à Rennes
Réclamez des contes – Auteure illustratrice: Delphine Jacquot – Éditions Les fourmis rouges – 18€ – Album
Delphine Jacquot, d’une écriture très habile et affûtée, passe en revue un florilège de contes qu’elle prend plaisir à croquer sous forme d’affiches publicitaires. Des réclames en veux-tu en voilà, qui mettent en scène les œuvres de Perrault, Grimm, Andersen et consorts. À chaque double-page son produit miracle, associé bien méthodiquement au personnage qui lui était prédestiné. On se délecte de la saveur accordée aux jeux de langue, distillés avec soin pour faire écho aux éléments de conte qu’on identifie avec un sourire complice au coin des lèvres. Des allumettes à flamme éternelle, une pince de crabe à prince, les chaussures sur mesure Sam Both, sont quelques exemples des merveilles qu’il nous est possible de découvrir au fil des pages de ce surprenant catalogue. Comme à l’accoutumée, l’illustration, particulièrement soignée, renforce l’impression de finesse et de subtilité qui se dégage de cet album. Elle se marie ici à merveille avec le style d’affiches d’époque remises au goût du jour par l’auteure. Une belle réussite pour un ouvrage à mettre entre des mains initiées aux contes classiques.
– Librairie La Courte Échelle