«Des romans résolument contemporains, des écritures percutantes, des sujets parfois « dérangeants », des textes d’auteur à contre-courant des modes». Voilà comment François Martin présente la collection Romans ados qu’il dirige chez Actes Sud. Une collection à l’identité visuelle très forte, et qui s’est installée très vite dans les rayons ados de nos librairies. Avec des traductions (comme Jack, d’A.M. Homes, ou Sous la piscine, de Justin D’Ath) mais aussi beaucoup d’auteurs français: Françoise Grard, Catherine Leblanc, Richard Couaillet. Nous avons voulu donner la parole à trois d’entre eux. Anne Vantal, Jean-Philippe Blondel et Gilles Abier ont chacun publié plusieurs textes dans cette collection. Ils nous parlent ici de leurs derniers romans parus – Voie interdite, (Re)Play, J’me sens pas belle – mais aussi des précédents, de leurs constructions, de leurs voix… De littérature, quoi. (par Madeline Roth, librairie L’Eau Vive à Avignon – Citrouille n°59)
MADELINE ROTH: Certains de vos romans reposent sur une construction très précise (le roman choral dans Peine maximale, le recueil de nouvelles «à chute» dans Accros, et beaucoup de romans adultes de Jean-Philippe Blondel, comme Accès direct à la plage, Juke-Box). La construction vient-elle avant l’histoire?
ANNE VANTAL: L’histoire elle-même vient en premier lieu, elle dicte la structure choisie pour la raconter. C’est ce qui fait l’originalité d’un livre et c’est ce que j’aime aussi en tant que lectrice: que l’on m’embarque, que je ne sache pas où je vais. Donc ce plaisir de lectrice, d’être un peu dans le flou, j’essaie de le retrouver en temps qu’auteur, en prenant le lecteur par la main. Pour Peine maximale, je voulais mettre le lecteur dans la position d’un énième juré, lui donner à lire les pensées et les paroles de gens concernés par ce procès. J’ai choisi le roman choral parce que c’était la meilleure manière pour que le lecteur devienne acteur du drame.
Pour Voie interdite, c’est presque le contraire, j’ai pris l’exact contre-pied: c’est un roman très bref, avec un seul personnage, anonyme, sans dialogues. Bien sûr que l’histoire est importante, mais la touche de l’auteur, c’est la structure, ce sont les mots qu’il choisit.
JEAN-PHILIPPE BLONDEL: Je crois que, dans mes romans ados en tout cas, l’intrigue et les personnages priment, le style et la construction sont au service de ce qui se trame – j’adhère à ce que les anglo-saxons appellent l’«objective correlative» – le système de narration qui colle à ce que l’on veut raconter.
GILLES ABIER: Je suis d’accord avec Jean-Philippe: ce que j’aime, c’est raconter des histoires. Mais je suis aussi d’accord avec Anne: c’est la façon dont on va les raconter qui va intéresser le lecteur (et l’écrivain). Quand j’ai envie de raconter une histoire, je me rends compte que j’ai tout de suite besoin d’avoir le titre et la fin. Mes textes sont toujours très construits, c’est vrai. Petit, je voulais faire de la musique. On apprend à faire ses gammes pour ensuite pouvoir improviser: c’est pareil. J’ai d’abord besoin de la structure pour me sentir libre, après.
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