Je me gare à la hâte devant les anciens bâtiments d’une imprimerie lyonnaise, au 75 de la rue Chaponnay. J’ai rendez-vous avec Anne-Bénédicte Schwebel, une des «mamans» du magazine Georges. Pour tout dire : sa directrice de la publication. C’est elle, là, sur la photo.
Passé le rideau de pluie et la grande porte en bois, l’atelier de Georges a quelque chose d’une ancienne « maison de naissance »: ses grandes vitres, ses ferronneries, son plancher en bois… Une sorte de couveuse géante baignée de lumière naturelle. Une autre photo? D’accord:
Je l’avoue, il y a quelques années, j’ai manqué le rendez-vous. Quand, à l’époque, j’ai vu débarquer Georges dans la librairie, je n’ai pas été convaincue qu’il s’adressait au plus grand nombre… J’avais même plutôt le sentiment que ce nouveau magazine était réservé aux petits-privilégiés-qui-ont-déjà-un-oeil-et-une pensée-rebelle-différente-et-aguérie… C’est encore un peu vrai, mon sentiment, mais pas que…
Parce qu’aujourd’hui je pense que Georges, c’est aussi pour ceux qui-vont-développer-une-pensée-rebelle-différente-et-aguérie, pour tous les lecteurs entre 8 et 12 ans, pour tous les adultes et les enfants qui s’intéressent au graphisme, tous… Enfin, à l’exception de ceux qui s’attachent à une recherche d’uniformité!
Donc, normal, j’ai maintenant envie de partager cette seconde rencontre avec vous, libraires, bibliothécaires, parents, et amateurs friands des belles trouvailles de nos Librairies Sorcières. Et ça tombe plutôt bien pour la joyeuse équipe éditoriale de Georges, parce que je crois qu’elle a, elle aussi, aussi à cœur de partager un peu de sa vie avec vous. Donc, ne nous gênons pas! Et pour commencer, voici la couverture du dernier numéro:
Georges, c’est donc le magazine pour enfants crée par les Éditions Grains de sel, il y a quatre ans maintenant, en 2011.
«Pourquoi Georges?», vous questionnez-vous. D’abord, et tout simplement, parce que lorsqu’un magazine s’appelle Georges et qu’on le tient entre les mains, on se retrouve en face de quelqu’un, qui s’adresse aux enfants et à leur parents.
Vous allez me dire si on l’avait appelé Bernard, ça le ferait aussi.
Mais lorsqu’on dit Georges, on a un peu l’image d’une porte qui s’ouvre, celle d’une grande maison, un tantinet bourgeoise, où l’on serait accueilli par un majordome, strict, bien élevé, plein de manières et qui, s’encanaillerait d’un petit clin d’œil, aux enfants. Si je peux me permettre une petite appréciation personnelle (je vais me le permettre, c’est moi qui écris après tout!) je trouve qu’en entrant dans les pages de Georges, c’est exactement ce que l’on ressent : une mise en page, une qualité graphique «tirées à 4 épingles». Mais attention avec pleins de clins d’œil, un peu partout, au fil des lignes, des illustrations, des pages… Donc: Georges, et pas Bernard.
«Et… sous le costume de Georges?», voulez-vous savoir. Sous le costume de Georges il y a (enfin, c’est une façon de parler, hein) Anne-Bénédicte Schewebel, la directrice de publication, et une fine équipe.
Ça fait du monde sous le costume? Ben oui. Mais Georges, c’est d’abord l’histoire de cette belle équipe, celle des éditions Grains de sel, c’est un travail d’artisans, d’indépendants, qui font tout, du début à la fin… Spéciale dédicace: quand on lit Georges, et si de temps en temps ça décoiffe (mais ne vous inquiétez pas, rarement ça défrise), c’est que, sous le costume du majordome, heu de Georges pardon, il y a l’humour musclé, la fantaisie et l’exigence de Stéphanie Lasne, la directrice artistique.
«Oui mais bon, ENCORE un magazine!» soupirez-vous. C’est que vous n’avez jamais ouvert Georges. Que vous ne l’avez jamais partagé avec un enfant. Georges est différent! Il détonne dans le paysage des revues destinées aux enfants!
Regardez bien, voyons!
En connaissez vous d’aussi beaux?
La réponse est non, et elle en appelle une autre: pourquoi n’en existe-t-il pas d’aussi beaux? Parce que les enfants ne le méritent pas? Parce qu’ils ne savent pas apprécier cette qualité graphique?
Non, c’est sans doute parce que la plupart des revues pour enfants émanent des grands groupes, qu’une minorité occupe toute la place et détient le monopole des «contenants» et des «contenus». Bref des gens très différents des organisateurs du Festival du Havre qui, l’été dernier, pour son thème «une saison graphique», a confié le projet lié à la jeunesse à Georges.
Et Georges, invité d’honneur du Festival, a conçu une exposition originale et interactive. Dans le même esprit que celui du magazine. Du magazine unique, donc, puisqu’il n’y a pas deux Georges.
Ouvrez ses pages, ça vous sautera aux yeux !
Carole Ohana, librairie À Titre d’Aile, Lyon
PS : et pour terminer de vous convaincre, une petite vidéo :