Il y a, lu par la librairie Rêv’en pages de Limoges

Il y a poète, et il y a peintre. Parfois les deux. Et lorsque l’autre rencontre l’un, à un siècle de distance, c’est comme si le temps n’avait plus de frontières. Dans cet album événement, Laurent Corvaisier semble se saisir d’Apollinaire avec la même spontanéité qu’il se laisse guider par ses pinceaux. Inspiré sans doute, ou simplement touché au cœur par cette espèce de grâce, inexpliquée, inexplicable, et qui n’appartient qu’aux grands poètes. Apollinaire chante l’amour, et la guerre… Et le geste du peintre s’anime des mêmes soubresauts. Même sa palette, reconnaissable entre toutes, semble subir les outrages de la poussière et du sang versé. Elle ne reprend des couleurs que lorsqu’elle chante la vie et l’être aimé. Mais la guerre est bien là, et le répit est bien court. Une page se tourne et c’est le vert de gris qui s’installe à nouveau. Le vaguemestre ? Une bien faible lumière qui vacille. Mais l’amour rend plus fort. Il persiste et chasse les larmes du poète. « Il y a dressé comme un lys le buste de mon amour ». Et puis les souvenirs montent au front comme une vague chaude qui s’emploierait à éteindre l’horreur du réel. « Il y a le Gulf Stream, si tiède et si bienfaisant ». Mais face à la guerre absurde, l’amour ne fait pas le poids. Restent alors les vers du poète et les couleurs du peintre.

Dans cet ouvrage anniversaire, Rue du Monde, commémore la grande guerre, conviant le poète Apollinaire et le peintre Corvaisier à célébrer l’amour et la paix, les images répondant aux mots comme pour mieux rappeler aux jeunes générations que tout ça n’est pas si loin, et que les couleurs du monde sont parfois bien fragiles. Un album touchant, agrémenté de photos d’époque, et une belle façon d’aborder le sujet de la première guerre mondiale avec les enfants.

Cyril Malagnat, librairie Rêv’en pages, Limoges

Il y a
Guillaume Apollinaire, Laurent Corvaisier
Rue du monde, 2013
Prix éditeur 18,50 €