L’Arbragan – J. Goldstyn – Éd. La Pastèque – 16€
Ça commence avec la perte d’un gant: celui d’un petit gars original et solitaire qui trouve refuge dans un vieux chêne nommé Bertold. Le lien entre l’enfant et l’arbre est si fort que l’illustrateur l’a affublé d’un béret en forme de gland. De son poste d’observation, ce gamin domine son village et ses habitants qu’il dépeint de façon savoureuse tout en posant un regard avisé et tendre sur la nature qui l’environne. Mais alors que le printemps a redonné aux arbres leurs feuilles, celles de Bertold se font attendre. Que faire quand un arbre, son arbre, meurt…? La réponse est à lire dans cet album, mais sachez d’ores et déjà que le gant de départ aura son importance, grâce à l’imagination géniale et émouvante de ce gamin. À l’instar de son personnage,
L’Arbragan est un ouvrage qui nous fait prendre de la hauteur. Il nous offre, avec beaucoup de poésie et de tendresse tant dans l’illustration magnifique que dans le texte, de nouvelles perspectives sur des thèmes forts: la différence, la solitude, la mort, le temps qui passe… Superbe!
Le Petit chaperon rouge n’a pas tout vu – M. Ferreiro – Éd. Gallimard Jeunesse – 10,50€
L’histoire démarre comme le conte d’origine. On croit emprunter les mêmes sentiers et nous voilà aiguillés sur des chemins de traverse, pilotés par le point de vue des protagonistes. Ça ressemble au Petit chaperon rouge et pourtant rien ne se déroule comme dans l’original… C’est et ce n’est pas Le Petit chaperon rouge! Chaque personnage, acteur ou témoin de l’histoire, nous raconte comment les choses se passent. Tous interviennent comme s’ils étaient appelés à tour de rôle à la barre, dans un registre très oralisé qui nous happe pour notre plus grand plaisir: «J’étais en train de chercher des truffes dans les bois quand une petite fille avec un manteau rouge à capuche m’est tombé dessus. Elle m’a flanqué une trouille pas possible parce que les humains ont la manie de m’attaquer.. » L’auteur zoome sur les figurants, les petits animaux des bois, leur donnant un rôle prépondérant, alors que le chasseur disparaît du scénario mais pas complètement non plus! La fin de l’histoire? C’est pour mieux… la découvrir différente, forcément! Des illustrations toutes simples avec des touches d’humour qui racontent aussi ce que l’histoire ne dit pas… jusqu’au joli supplément sur la quatrième de couverture de ce bon petit format idéal pour de nouveaux lecteurs. Mais jubilation garantie même pour les plus grands, les plus avertis… Car ils n’avaient pas tout vu !
La Valise rose – S. Morgenstern, S. Bloch – Éd. Gallimard Jeunesse – 13,50€
Parmi tous les cadeaux reçus par le très attendu et déjà très aimé Benjamin à sa naissance, c’est une valise rose offerte par sa grand-mère visiblement peu conventionnelle qui a sa préférence. Et l’on découvre au fil des pages comment elle le suit tout au long de sa vie, envers et contre tout et tous. Une belle histoire de transmission – à poursuivre, car la fin du livre le suggère – est offerte aux lecteurs. Subtilement, Susie Morgenstern parle de confiance en soi et de refus des conventions. Enfin – et là aussi c’est peu banal en littérature pour la jeunesse! – la valise rose pose un regard amusé sur la relation triangulaire qui lie mère, fils et belle-fille. Et s’il est vrai que le rose fluo ne nous fait pas souvent l’honneur de sa présence dans la bonne littérature pour la jeunesse, ici cette couleur éclate dans l’illustration de Serge Bloch. Elle caractérise l’objet-sujet du livre en même temps qu’elle marque tout l’album de sa pétillante empreinte…
Les Farfelus – M. Tanco – Éd. Les fourmis rouges – 13,80€
C’est quoi cette histoire? Quelle idée de faire de grandes enjambées sur les trottoirs ou d’applaudir quand l’équipe adverse a gagné ? Et regardez-le celui-là, dans l’enclos parmi les chiens, que fait-il ?.. Et celui-là qui tire la langue aux voitures qui passent! Et ce petit garçon qui embrasse les arbres… Non mais on nage en plein délire, ils sont complètement farfelus ces gens! Ils ne peuvent pas se tenir correctement, faire comme tout le monde? Eh bien apparemment non! Et on envie de dire : c’est tant mieux ! Que le monde soit peuplé de farfelus, des petits, des grands, encore et toujours !… Un album frais, engagé (comme c’est si bien les publier les Fourmis rouges) qui montre (et démontre) que monde ne serait pas ce qu’il est s’il n’était habité de tous ces « farfelus »… Oui, ces gens qui font de grandes enjambées pour ne pas écraser les p’tites bébêtes, ces gens qui profitent de chaque moment, de l’instant présent pour témoigner à la vie qu’elle est belle et si précieuse: c’est grâce à eux, ces farfelus-là, que le monde est si intéressant, surprenant, et amoureux! Un bel album riche d’humanité, qui donne envie de le blottir contre soi et de l’offrir à tous !
Une journée avec Mousse – C. Lebourg – Éd. l’école des loisirs – 8,50€
Une journée avec Mousse, c’est une de celles que l’on aimerait vivre plus souvent: un réveil en douceur dans une petite maison au bord de la mer, la langueur des draps tièdes, les rayon du soleil, la fraîcheur du grand air et quelques gorgées de café en écoutant la radio. Mousse est un drôle de petit personnage à rayures, avec un museau pointu. Rien ne lui plaît tant que de se laisser bercer par le son des vagues, au point que souvent, la mer envahit sa maison! C’est comme ça que Bichon, qui a des airs de morse, débarque dans sa vie. D’abord un poil envahissant et surtout pot-de-colle, il saura conquérir l’amitié du petit Mousse… Quelle belle histoire que cette première lecture, toute douce et pleine de fraîcheur! Claire Lebourg nous parle ici d’amitié, de solidarité mais aussi de rêveries et de petits moments de grâce. Les illustrations tout en finesse complètent avec douceur la fantaisie et le charme de cette petite fable intemporelle et précieuse qui nous berce et nous laisse le sourire aux lèvres… jusqu’à la dernière page!