Marc Boutavant : « Aller voir ailleurs m’a permis de faire des bébés que je n’aurais peut-être pas faits autrement ! »

  • Publication publiée :4 juin 2017
  • Post category:Archives
Marc Boutavant, photo @ Association Coup de pouce – Prix des Premières Lectures 2015 

Christine Bouyssel (librairie Le Pain de 4 Livres) a rencontré Marc Boutavant, l’illustrateur d’Edmond, et (co)père de plusieurs personnages (Ariol, Chien pourri, Mouk…) toujours parfaitement à portée des enfants, publiés par divers éditeurs.
CHRISTINE BOUYSSEL: Comment expliquez-vous cette diversité d’éditeurs?
MARC BOUTAVANT: Sans être amoral, je n’ai pas appris à être fidèle. Je trouve cette tradition «maison», qui recouvre souvent de poussière les aspirations, un peu désuète. Je veux bien reconnaître qu’il y a des exceptions, pour des auteurs nés entre les murs de la maison, qui éprouvent peut-être davantage de culpabilité que moi, ou bien qui se sentent bien comme ça et n’ont pas l’idée d’aller voir ailleurs… Et aller voir ailleurs m’a permis de faire des bébés que je n’aurais peut-être pas faits autrement!   
CHRISTINE BOUYSSEL: Alors dites-nous un peu comment est né le bébé Ariol
MARC BOUTAVANT: Emmanuel Guibert a répondu il y a dix-huit ans à un «appel d’offre» de Bayard qui cherchait, un peu à la suite de Tom-Tom et Nana, de la BD toute fraîche. Emmanuel portait en lui un personnage, Ariol, et tout son monde. J’ai dessiné les oreilles et les lunettes d’Ariol et c’est parti! Bayard l’a adopté comme son propre enfant, ou presque. Sardine de l’espace et Zélie sont de la même génération…
CHRISTINE BOUYSSEL: Chien Pourri? Mouk?
MARC BOUTAVANT: Chien Pourri est né à L’école des loisirs, et c’est Colas Gutman, une vedette de l’éditeur, qui avait ce toutou en tête. Une niche l’attendait, la collection Mouche. Quand on s’est rencontrés à Saint-Paul-Trois-Châteaux, Colas et moi, on s’est plu (comme quoi les salons du livre, c’est important!). Après m’avoir testé sur La princesse aux petits doigts boudinés, il m’a envoyé le texte de ce qui allait devenir le premier des Chien Pourri. Quel style! Ça m’a dérouté, mais tellement accroché que j’ai adoré me renouveler pour créer ces personnages. Au début, Colas n’était pas très chaud pour faire une série avec ce chien; et puis il a ensuite été convaincu, je pense, par mes dessins et mon investissement… Mouk [série dont Marc est également auteur, ndlr], est né chez Mila, avec l’aide de l’éditrice Anne Weiss. Mais la maison allait bientôt fermer portes et volets pour une durée indéterminée. Mouk est alors parti à vélo chez Albin Michel, et il a été bien reçu par Béatrice Vincent et Marion Jablonski. Le changement de maison a influencé le projet, sa dimension – pour le meilleur. Du bienfait de la rencontre avec une vraie équipe éditoriale, comme souvent et pour beaucoup d’entre nous, les auteurs et illustrateurs…
CHRISTINE BOUYSSEL: Et, enfin, Edmond et ses amis?
MARC BOUTAVANT: Cela fait un petit moment que je dessine pour Nathan, j’ai illustré pas mal de documentaires, avec quelques fiertés plus grandes que les autres, comme le livre Le sapin d’Andersen. Astrid Desbordes, elle, y travaille comme éditrice depuis une quinzaine d’années. Elle écrit aussi ses propres histoires, souvent illustrées par Pauline Martin. On s’est souvent croisés, et comme je trouvais son style délicieux je lui avais demandé de réfléchir à des histoires de Mouk. Puis c’est l’équipe Nathan qui est venue me voir, avec le projet d’Astrid, Edmond, la fête sous la lune. C’était pétillant, encore une autre forme, une autre palette, un autre univers dans lequel se coucher et rêver. J’ai accepté avec enthousiasme! Et puis après cette première histoire, des amis ont rejoint Edmond, une série a commencé, qui a trouvé son format, son allure, son rythme… L’équipe éditoriale est derrière les aventures d’Edmond, et l’enveloppe merveilleusement – merci à elle! Astrid, elle, avec un tact inouï, réussit à me cantonner au dessin, alors que j’essaie de déborder régulièrement en lui suggérant des idées de personnages avec des noms saugrenus! Mais elle a compris que le meilleur jeu, c’est chacun de son côté du filet, et on s’envoie la balle…


Propos recueillis par Christine Bouyssel, librairie Le Pain de 4 Livres à Yerres


C’est la nuit. Edmond l’écureuil cherche le sommeil. Allongé dans son lit, au creux d’un châtaignier, il entend alors un son étrange, un tuc-tuc-tuc… Poussé par la curiosité, il va frapper chez son voisin du dessus, Georges Hibou. Celui-ci est assis occupé à coudre un costume de dragon. Edmond lui fait part de son inquiétude. Georges Hibou propose alors d’aller explorer la nuit noire pour découvrir d’où vient ce son. Les deux amis cheminent dans la forêt. Tenant une lanterne et suivi par des lucioles, Georges Hibou nous fait partager sa vision de la nuit. Belle et calme, elle apporte aussi réconfort… Un très joli ouvrage à l’attention des petits, rédigé avec un ton juste et malicieux, servi par un dessin pétillant; une proposition d’album pour aborder les tracas du coucher. On retrouve avec délice les compagnons d’Edmond rencontrés dans d’autres albums: La chose, La belle journée, La course de luge, L’anniversaire d’Edmond. –  Librairie Le Pain de Quatre Livres