Prix Sorcières 2014 Romans Juniors : Le Rêveur (+ nominés)

Lauréat Premières lectures


Le Rêveur – Pam Munoz Ryan et Peter Sis – Trad. Pascale Houssin – Éd. Bayard Jeunesse 15,90€ – Neftali est un enfant chétif, embarrassé par un bégaiement. Son père, qui le voudrait fort, veut en faire un médecin. Mais Neftali est amoureux des mots, curieux, collectionneur. Les livres qu’il dévore, l’amour de «mamadre», qui remplace sa mère morte peu après sa naissance, son frère Rodolfo et Laurita sa jeune sœur, l’aident à surmonter les brimades et les sarcasmes de son père qui règle la vie de la famille au son strident de son sifflet de cheminot. Et puis il y a son oncle Orlando qui a créé un journal qui défend les faibles, les opprimés, les Mapuches chassés de leur terre et qui publiera le premier texte de Neftali. C’est pour tenir tête à son père qui a brûlé ses premiers écrits et lui interdit de publier, qu’il prendra le nom de Pablo Neruda… Un très beau texte pour évoquer l’enfance de Pablo Néruda, et une très belle introduction à sa poésie, à sa perception du monde, de la nature, de la défense des faibles. Et pour couronner le tout, le texte est accompagné de dessins de Peter Sis. Ces illustrations donnent de la force, de la sensibilité, de l’émotion au récit. Un très beau texte à dévorer et, également, un très bel objet. Une vraie réussite.

Photo : Simon Roguet

Nominés Premières lectures



Ma grand-mère m’a mordu
Audren – Éd. L’École des Loisirs, coll. Neuf – 6,50€
Le titre est surprenant et provocateur. Pourtant, c’est vrai Marcus, qui est en CM1 et vit seul avec son père après la séparation de ses parents, s’est fait mordre par sa grand-mère paternelle à qui il n’a pas voulu céder la télécommande de la télévision! Évidemment, et bien qu’il ait gardé la marque de cette morsure, personne ne le croit. En tous cas pas les adultes, qui l’accusent même de mentir! Marcus vit cela comme une profonde injustice. Mais voilà que sa petite voisine qui, elle, le prend au sérieux, lui propose de faire partie de l’association AVMV, l’Association des Victimes des Mémés Violentes. Marcus reprend courage, décide de ne plus se laisser faire et d’appliquer la devise «œil pour œil, dent pour dent»!… Dès le début de ce roman, le ton est donné. L’auteur nous parle, en filigrane et avec avec légèreté, de choses importantes: les rapports et conflits familiaux, la place faite aux enfants… et leur regard plus ou moins candide mais toujours juste porté sur le monde des adultes.




Au cochon porte-bonheur
Jong-Ryeol Kim et Suk-Kyeong, trad. Yeong-Hee Lim – Éd. Picquier Jeunesse – 12,80€
Un jour, les habitants d’Azalée apprennent l’ouverture prochaine d’Au cochon porte-bonheur, une boutique à l’assurance aussi curieuse que l’enseigne: un cochon en redingote promet l’acquisition d’objets magiques exauçant votre vœu le plus cher. La nouvelle se répand et une foule de curieux se presse, surtout depuis que les premiers acheteurs sont repartis très satisfaits avec un sourire énigmatique aux lèvres. Peu à peu la pagaille s’installe dans la ville, les médias s’en mêlent et les autorités ont du mal à endiguer ce vent de folie qui souffle sur la région (d’autant plus que, mystérieusement, voilà un afflux de cochons se promenant en toute liberté dans les rues!)…. Ce roman est une fable cruelle et drôle sur la convoitise, l’insatisfaction, le désir de possession et de réussite chez les partisans du moindre effort. Vu par les yeux d’un enfant (dont les parents sont gagnés par ce mal contagieux depuis qu’ils sont devenus propriétaires d’un vase reproduisant en double tout ce qu’il peut contenir) le monde des adultes n’est pas à son avantage. Seul le jeune narrateur sera assez lucide pour faire preuve de sagesse, aura le courage de résister à la tentation et de souhaiter qu’un semblant d’ordre se rétablisse. Les illustrations qui ponctuent ce court récit renforcent l’atmosphère inquiétante qui s’en dégage.



Le Mystérieux cercle Benedict
Trenton Lee Stewart, trad. Jean-Baptiste Dupin – Éd. Bayard Jeunesse – 14,90€
Une annonce intrigante paraît dans les journaux. Des enfants aux aptitudes exceptionnelles sont invités à passer des tests à l’issue desquels ils seront choisis pour vivre une expérience unique. Seuls quatre, parmi les nombreux concurrents sont retenus: deux filles, deux garçons, dont le héros Reynie. Leur point commun: ils sont seuls au monde. Désormais membres du Mystérieux Cercle Benedict, ils se voient confier la mission d’infiltrer une bien curieuse pension isolée sur une île, et de faire parvenir des renseignements sur ce qui s’y trame. Ils ne peuvent compter pour cela que sur eux-mêmes, en se fiant à leur intuition, leurs talents et en se serrant les coudes. Car il ne s’agit rien tant que de déjouer un complot visant à contrôler les esprits, démasquer un être malfaisant ne reculant devant rien pour asseoir sa domination!… Une atmosphère inquiétante, des personnages loufoques dans ce roman foisonnant, riche en rebondissements et énigmes inattendues. On se laisse entraîner dans cette histoire improbable dont les principaux acteurs sont des enfants attachants par leur personnalité singulière entachée de solitude affective. Et, c’est certain, il en sera parmi les lecteurs pour avoir envie de faire partie du Mystérieux Cercle Benedict!



Le Théâtre du poulailler
Helen Peters, trad. Vanessa Rubio-Barreau – Éd. Gallimard, coll. Folio junior – 9,20€


Depuis quelques jours, Hannah est en effervescence: elle et son amie Lottie ont décidé de participer à un concours de théâtre pour jeunes amateurs. Mais comment avoir une chance de gagner quand on doit tout faire toute seule contre la volonté de son père, avec une ferme à sauver, une sœur à apprivoiser et un amoureux encombrant par-dessus le marché? On agit comme Hannah: on ne raconte pas tout, on file en douce pour échapper à un père qui, de toute façon, est trop enfermé dans sa tristesse, on s’entoure de personnes bienveillantes, on se méfie, on y croît! Sur un rythme agréable et prenant, le lecteur est invité à suivre les deux jeunes héroïnes de péripéties en péripéties, d’espoirs en déconvenues. Ce roman mêle avec originalité le théâtre et le monde de la ferme avec beaucoup de brio. Et bien que les conditions de vie ne soient pas faciles, on se sent bien dans l’univers de Hannah… à tel point qu’on a du mal à le quitter!


Illustration : Sara

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