Un trésor de symboles et de poésie où chacun puisera ce qui le touche: Mère Méduse, de Kitty Crowther – lu par la librairie Pages d’Encre

La nuit tant attendue est enfin là. C’est le grand moment et Méduse la farouche devient Mère en mettant au monde une petite fille. Irisée commence sa vie à l’abri dans l’extravagante chevelure de sa mère et Méduse la chérit comme un trésor : «Tu es ma perle, pense Méduse».

Mais quand les habitants du village s’approchent trop près, Méduse referme sa chevelure et s’y barricade avec sa fille : «Tu es ma perle et je serai ton coquillage, dit mère Méduse dans un souffle», et Méduse refuse de partager sa fille.

Irisée grandit portée par l’amour immense de sa mère et la complicité qu’elles partagent, mais malgré leurs jeux et leurs découvertes, son regard se tourne vers les autres enfants et les cheveux de sa mère pourtant si doux, se muent bientôt en entrave…

Les cheveux de Méduse sont un personnage à part entière de l’album, ce sont eux qui racontent l’histoire et parlent pour elle. Ils sont doux et sages quand ils sont un cocon pour Irisée, mais ils veillent quand d’autres enfants s’approchent trop près, et deviennent presque inquiétants quand la petite fille avoue son désir de s’éloigner.

Des cheveux comme autant de barreaux qui protègent d’abord mais finissent par enfermer et étouffer. Mais par amour pour Irisée, Méduse surmontera sa méfiance et qui sait si elle ne se laissera pas surprendre?

Avec une infinie délicatesse Kitty Crowther nous parle ici de liens, de ceux qui unissent une mère et son enfant, des liens si forts qu’ils ne peuvent se partager au début. Elle parle alors de peur, de perte, de renoncement. Peur de voir ceux que l’on chérit s’attacher à d’autres que soi, peur de perdre leur amour, les voir s’éloigner et peut-être ne plus les reconnaître, mais par amour, renoncer quand même à les garder pour soi.

A travers son envahissante chevelure, Méduse nous interroge et nous rassure sur la nature de ses liens avec sa fille: et si laisser Irisée s’ouvrir aux autres était la plus sûre façon de renforcer leurs liens? Et si justement, la force de cet attachement permettait à chacune d’elle d’affronter le monde, de vivre sa vie pour mieux se retrouver? Alors les liens qui unissent les enfants et leurs parents seraient la plus grande force qui soit, des liens invisibles, insoupçonables, mais pourtant indéfectibles…

Ce livre est un trésor de symboles et poésie et chacun y puisera ce qui le touche, mais Kitty Crowther a définitivement le don particulier de nous toucher très fort…

Vanessa, librairie Pages d’Encre à Amiens

Mère Méduse – Kitty Crowther – Éd. Pastel – Date de parution : novembre 2014