Parlons (enfin) des règles, les vraies, les rouges sang, et pas ce petit filet de liquide bleu azur qui s’écoule dans les publicités… Par La Librairie La Boîte à Histoires

  • Publication publiée :27 mai 2018
  • Post category:Archives

Il y a quelque temps un couple sympathique et souriant est entré dans la librairie.
Les deux qui le formaient sont restés un moment, regardant les livres avec attention, visiblement connaisseurs.
Mais qui cela pouvait-il bien être ? m’interrogeai-je moi-même en mon for intérieur.
Sûrement pas des bibliothécaires -ils étaient définitivement trop bien habillés pour ça- pas plus que des instits, qui m’auraient déjà plaquée au sol en exigeant une remise et un rouleau d’affiches.
Surmontant ma timidité naturelle, je me suis approchée d’eux pour leur proposer mes conseils avisés.
Et ben c’était des éditeurs dites donc ! Ceux des éditions de la Ville Brûle.
Ne me dites pas que vous ne connaissez pas ??
C’est donc que vous n’avez pas lu attentivement tous les articles du blog de La Boîte à Histoires, et vous m’en voyez très attristée.
J’ai en effet eu l’occasion d’y parler de cette maison d’édition engagée et militante lors de ces deux brillantes chroniques, là d’abord et puis là encore.

Et quel plaisir de rencontrer pour de vrai des éditeurs dont on admire le travail !

Le plaisir était réciproque visiblement, et nous avons joyeusement échangé quelques gentillesses d’usage mais tout à fait sincères : « Vous faites un super boulot/ merci vous aussi / non mais vous plus/ non vous d’abord/ je n’en ferai rien/ j’adore votre sélection/ vous c’est encore mieux/ merci pour votre soutien/ vous plaisantez c’est un plaisir/ votre librairie est magnifique et vous-mêmes êtes d’une beauté époustouflante…» (j’en rajoute un brin pour les besoins narratifs).

Bref c’était très sympa d’autant qu’ils ont pu constater par eux-mêmes et non sans émotion que notre livre de chevet de libraire, tout au moins celui qui reste à résidence sur la caisse, n’est autre que le sus nommé Pourquoi les riches sont-ils de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres ? Et ce par pile de cinq s’il vous plaît ! (on se croirait à la Fnac)

Tout ça pour dire quoi au juste ? Eh bien pour vous parler d’un livre paru donc aux éditions de la Ville brûle il y a quelques mois déjà,  Les règles … quelle aventure !, et que je n’ai pas eu le temps de chroniquer (vous savez ce que c’est, nous les libraires, un paquet cadeau par ci, deux trois livres à ranger par là et on a vite fait de se noyer dans un verre d’eau).

Parlons donc (enfin) des règles, les vraies, les rouges sang, et pas ce petit filet de liquide bleu azur qui s’écoule dans les publicités. D’ailleurs la couverture donne le ton avec cette guerrière combative et néanmoins souriante prête à pourfendre tous les tabous.

Et dieu sait qu’il en circule des conneries sur le sujet depuis… le début de l’humanité certainement !

En effet, en parlant des règles on parle de 3,5 milliards de personnes sur la planète, mais on soulève également de grands questions sociétales sur la domination masculine, la sexualité, la religion et la représentation des femmes au fil de l’histoire.

Vaste programme que cet ouvrage synthétique et intelligent parvient à balayer avec beaucoup de clarté et de pédagogie.

Tout est passé en revue, les croyances et les superstitions sont décortiquées, l’aspect physiologique est expliqué, l’anatomie féminine est détaillée, les douleurs ne sont pas tues,

On parle de toutes les protections à disposition, de l’opacité des fabricants sur la compo très douteuse des serviettes hygiéniques et autres tampons, et également du coût de ces dites serviettes hygiéniques qui laisse à l’écart plus de 500 millions de femmes !

Une inégalité criante relevée par ce livre qui dénonce également toutes les inepties qui pèsent depuis des millénaires sur nos têtes et nos ventres comme la mayonnaise qui tourne (??!!), le soupçon de saleté, les performances moindres, sans parler des diktats religieux qui considèrent la femme comme impure et la relègue de fait hors de l’espace public.

On apprécie le ton léger et dédramatisant de cet ouvrage pertinent et savamment documenté où l’on apprend une foule de choses (eh oui, même nous les grands !).

Grâce aux connaissances qu’il apporte et à ce vent de liberté qui souffle au travers de ses pages, nul doute qu’il saura donner ou redonner confiance et fierté aux jeunes filles.

On applaudit donc des deux mains ce petit pamphlet salutaire et féministe qui mérite d’être mis entre toutes les mains et dans toutes les bibliothèques !
Véro, Librairie Sorcière La Boîte à Histoires à Marseille

Texte d’Elise Thiebaut
Illustrations Mirion Malle
Editions La Ville Brûle