Leurs livres présentés par les auteurs : Rage, par Christophe Desmurger

[Parce que lorsqu’il enseigne dans sa classe d’école élémentaire, Christophe Desmurger reçoit des auteurs jeunesse…. Parce plusieurs Librairies Sorcières vendent aussi des livres de littérature pour adultes…]

Raphaël, la quarantaine un peu désabusée, retrouve par hasard Serge en marge d’une manifestation à laquelle ils ne participent ni l’un ni l’autre.

Les deux meilleurs amis du monde ne sont pas vus depuis vingt ans.

C’est l’occasion pour Raphaël de replonger dans leur adolescence.

Raphaël Dubois se sentait commun. Ni aventurier, ni voyou. Il faut dire qu’avec un tel nom!

Il aurait pourtant tant aimé laisser s’exprimer cette colère sourde qu’il ressentait sans trop savoir pourquoi.

Alors, Raphaël écoutait les colères des autres. Celles de Renaud, le chanteur qui voulait que ses chansons soient des poings dans la gueule, celles de Serge qui avait du bol. Avec son père absent et sa mère bancale, il avait tout pour être énervé.

RAphaël et SerGE, frères de RAGE, jumeaux de Perfectos fendaient la nuit à moto et Raphaël oubliait son père CPE, sa mère tristement belle, sa vie banale.

Renaud pour l’un, Les Bérurier Noir pour l’autre, telles étaient les étoiles rebelles de Raphaël et Serge dans un monde étriqué à réinventer chaque soir.

Outre les virées à moto et les soirs à refaire le monde il y avait les amis, les premières amours -celles qui tuent l’enfance-, les études…

Autant de chemins plus ou moins chaotiques qui malmènent parfois l’amitié.

Résiste-t-elle à tout, l’amitié?

Même à vingt ans d’absence?

La RAGE peut-elle renaître de ses cendres?

Christophe Desmurger

Le FB de Christophe Desmurger : ici


Extrait de RAGE

« Il a du bol, Serge. Il a tout pour lui. Un père absent, une mère bancale. Il a le droit d’être énervé. Il ne s’en prive pas. Il ne garde rien. Il jette tout à la gueule des autres. Des professeurs qui le renvoient, des flics qui le gardent à vue, des filles qu’il n’aime plus. Il s’en fout. Sa mère se démène pour lui trouver une nouvelle école, les flics finissent toujours par le relâcher et les filles s’évanouissent dans ses bras comme les feuilles tombent des arbres en automne. Comme je l’envie. Avec les filles, j’arrive toujours après l’automne. Quand l’arbre n’a plus de feuilles. Je l’envie, mais je ne lui en veux pas. Aux filles non plus. Le vacarme de sa vieille bécane précède son arrivée sur la place de l’église. Une anglaise, un cadeau de son oncle. Il retire son casque et, avant de poser son regard sombre sur l’assemblée, sa main débroussaille ses cheveux noirs. Et l’on contemple. Tous sous le charme. Emilio, Sarah et tous ceux qui les accompagnent. Et l’on ne sait même plus que j’existe. Moi-même, j’en doute parfois. Quand Serge me prête sa Triumph et que je sors de la dernière courbe à l’entrée du village, personne ne se méprend. Ce n’est que moi. Nous portons pourtant le même blouson de cuir. Des Perfectos noirs ornés de quatre lettres rouges.

Un soir, nous avons décidé de sceller notre amitié. D’ailleurs, il ne s’agit pas d’une simple amitié. Nous avons choisi d’être des frères. Des vrais. Pas de ceux qu’imposent les familles. Nous avons fait de la place sur la table encombrée de sachets de chips et de canettes de bière pour y disposer avec soin nos Perfectos. Graves et silencieux, nous avons peint de nos mains gauches ce qui nous relie. Quatre lettres rouges indélébiles.

RAGE. »

Christophe Desmurger
éd. Fayard